Journée d’étude le 1 février 2025 à Marseille- Cipm

conférence, journée d’étude

de 11 h à 13 h

et de 14 h 30 à 18 h

La revue Attaques: traductions, poésie et politique

Seloua Luste Boulbina, Vincent Broqua, Jalal El Hakmaoui, Patrícia Lavelle, Stéphane Nowak Papantoniou, Ada Tosatti, Laurent Cauwet

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Les éditions Al Dante ont développé un espace spécifique dans le champ éditorial. La revue internationale Attaques articule la question de l’engagement, des dossiers (théoriques, artistiques, poétiques) et des chantiers poétiques en cours : une manière de relier des propositions d’organisations et des esthétiques (re)naissantes, de l’histoire des avant-gardes aux enjeux actuels : « notre histoire est toujours demain ».
Des passerelles transculturelles, transgénériques, translinguistiques se sont construites contre l’assignation identitaire, sociale et culturelle. La revue Attaques agit comme fer de lance de ces questions. Comment la poésie peut combattre ou détourner les stratégies de séparation sociale et culturelle ? Comment s’opèrent les traductions du politique au poétique (et « du poétique à l’action », comme dirait Clemente Padin) ? Quels dispositifs déjouent les attentes génériques ? Au cours de cette journée d’étude, ces questions seront abordées et débattues dans les interventions sous des angles esthétiques, linguistiques, et politiques.

 

Laurent Cauwet et Stéphane Nowak Papantoniou

Au programme de la journée, en présence de Laurent Cauwet.

Matin

• 11h00 — Accueil du public

• 11h10 — Michaël Batalla

Directeur du Cipm

Mots d’ouverture et de bienvenue

• 11h15 — Stéphane Nowak Papantoniou

Commissaire de l’exposition AL DANTE : LE RAOUT. Chercheur, docteur en littérature générale et comparée, spécialisé en poésie, performance, recherche-création, chargé de cours à Aix-Marseille-Université.

Poésie, traductions, politique

 
Les éditions Al Dante occupent une place spécifique dans l’espace éditorial, articulant chantiers poétiques et questions politiques à travers sa production de livres, disques et son organisation d’événements. Peut-on « traduire » poétiquement des situations politiques ? Ou l’inverse ? À travers des exemples issus d’ouvrages parus aux éditions Al Dante, nous questionnerons ces relations.

• 11h45 — Vincent Broqua 

Professeur à l’université Paris 8, Master de création littéraire.

Faire passer la frontière


On a des questions pour la frontière. La frontière n’est pas du genre facile, elle a des conditions. On se lasse de la frontière, on veut l’éviter, l’oblitérer, l’anéantir et pourtant elle se rappelle à nous, constamment. Elle n’est rien et pourtant elle persiste, elle est là, infranchissable, souvent, elle est le signe de la mortalité, son incarnation même, par centaines. Certain.es la passent, d’autres non, à quelle condition? A quelle condition la frontière est-elle une notion pour la poésie, y compris quand la poésie tente de la dépasser, de l’abolir transnationalement? Si un président étatsunien veut renommer le golfe du Mexique « Golfe de l’Amérique » (où « Amérique » signifie Etats-Unis) et s’il veut envahir le Canada, le dépassement de la frontière opère-t-il toujours? Par le poème, par les langues et les corps, on tentera de réexaminer cette vieille question de la frontière, cette question qu’on pensait périmée, passée, et qui, pourtant, revient nous hanter politiquement et poétiquement dans toute sa complexité.  

• 12h15-12h45 — Discussions

Après-midi

• 14h15 — Accueil du public

• 14h30 — Ada Tosatti

Maîtresse de conférence en Littérature italienne contemporaine à l’Université Sorbonne Nouvelle et traductrice.

Nanni Balestrini : langage et opposition

Dès les années soixante, au sein de la Néo-avant-garde italienne, et jusqu’à sa mort, Nanni Balestrini (1935-2019) n’a eu de cesse d’explorer le rapport entre langage et réalité, entre aliénation et pouvoir de la parole. Fidèle à la conviction que « l’attitude fondamentale de la création poétique est de ‘taquiner’ les mots, de leur tendre une embuscade […], d’exercer une violence contre les structures du langage », aspiration formulée dans l’essai Langage et opposition, il a constamment transformé la poésie en action subversive, en en faisant un « véritable fouet pour le cerveau des lecteurs » quotidiennement submergés par le lieu commun et la répétition du même.

• 15h00 — Jalal El Hakmaoui 

Poète, traducteur, directeur de la Maison internationale des traducteurs littéraires au Maroc et de la Revue électronique de poésie internationale.

La langue de l’ennemi. 


Pourquoi ne traduit -on pas beaucoup de poésie de langue arabe du Maghreb en France ? Pourquoi considère -t-on que les littératures de ces ex colonies sont exclusivement francophones ?  S’agit-il d’une simple ignorance géographique ou d’une histoire coloniale toujours active par rapport à cette langue ?

• 15h30 — Seloua Luste Boulbina

Philosophe et politiste, chercheuse associée au LCSP de l’université Paris Cité.

Carte blanche (entre philosophie et poésie)


La revue Attaques a ceci d’original que de donner entière carte blanche à ses invités. C’est ainsi que j’ai publié dans cette revue de manière entièrement libre, non seulement dans le contenu, ce dont j’avais l’habitude, mais aussi dans la forme. Cette hospitalité remarquable a fait évoluer mon écriture. Déjà éclectique dans mes références, j’ai pu laisser libre cours à mon goût pour le collage qui, sur le plan discursif, incarne la polyphonie et l’hétérogénéité qui sont pour moi indissociables de la réflexion philosophique. J’ai publié ainsi, avec Laurent Cauwet, chez Al Dante, Alger-Tokyo, Des Émissaires de l’anticolonialisme en Asie, en 2022. Puis, en 2024 chez Jimsaan, et en 2025 chez Zulma, Sortir de terre, Une philosophie du végétal. Mon intervention portera donc sur ma façon de penser et d’écrire, et sur ce qu’elle doit à Laurent Cauwet.

• 16h00 — Patrícia Lavelle

Professeure des universités en théorie littéraire (PUC-Rio) et chercheure (CNPq-Brésil).

Poétique translangue et voix polyphoniques  

Le poème renforce des frontières langagières car il renvoie à ce qu’il y a de plus singulier dans chaque langue. Cependant, la création poétique surgit souvent avec la conscience radicale de la pluralité langagière dans ses multiples interfaces, elle accompagne un regard étranger pour sa propre langue. Cette étrangeté du propre intensifie les forces de transformation à l’intérieur de chaque langue, élargissant ses limites, amplifiant ses horizons relationnels. Loin de toute visée ontologique, cette hypothèse permet de repenser la notion benjaminienne de « pur langage » (reine Sprache) dans la perspective d’autres pratiques et d’autres expériences qui contribuent à dynamiser les relations entre les langues. Ainsi, je déplace la question de la traduction à d’autres pratiques « translangues ». Ce déplacement me conduit à penser une « poétique translangue » qui s’interroge aussi sur les polyphonies citationnelles traversant certaines voix contemporaines, dans une approche critique et politique du rapport au passé.   

• 16h30-17h30 — Discussions. Clôture.