…la sécurité des personnes et des biens n’est plus assurée
Et qu’est-ce que je fous ici dans la bourle à bourler parmi les bourleurs pleins sans savoir ce que je bourle c’est fou de rien savoir à ce point sur la densité la consistance de la bourle ce qu’il y a dans la bourle s’il y a des boîtes de conserve périmées des calendos frais ou du cobalt pur / je bourle tu bourles dans ces bourles immenses qui se forment en bandant des arcs de désir se développent croissent oblongues puis rondes puis s’allongent et s’effilochent parfois postillonnent du crachin mou et rêche / je mâche mon chewing-gum menthol haleine fraîche retour assuré tu déballes ta bourle hors de la mâchoire les incisives élimées et tu t’emballes ton cadeau à l ‘intérieur avec le bonheur d’éclater un paquet gonflé d’air / dans la bouche tout d’un coup il devient petit et dur comme une toute minuscule fiente – y a que la bourle qui sait ce que je fous à ce moment ++ précis mais elle s’en fout entièrement la bourle devenant boule elle arrête pas de gonfler dans sa bande dessinée pour illettrés et son mirage de possessions lascives elle continue de grossir presqu’ovale une peau de pêche tendue une outre pleine jusqu’aux os à marée haute comme si enceinte gorgée elle enfle raide jusqu’à ce qu’
UNE FOIS ça pète ça sorte ça explose et fasse tomber les murailles d’un coup les forteresses d’une rafle de vent les murs d’une frappe d’une énorme boule d’acier / on attend tous que ça pète les mains croisées sur la poitrine ou parfois les poings sur les hanches pour changer elle a perdu les eaux c’est pour bientôt y a du sang sur les murs c’est le moment de se frotter les mains et de passer à la caisse cash-cash express disent les experts on attend / leur proverbe dit quand il y a du sang sur les murs il est temps d’acheter des actions, quand il y a accalmie c’est bon pour les obligations, agir ou s’obliger telle est la question la volute de fumée tout autour et le souvenir du champignon de poussière qui monte vertical après l’impact et les cendres en pluie sur nos cheveux laqués et nos loques chéries tout autour les autres bourlent et « oh la belle bourle » et « c’est quand le bouquet final ? » et « pas encore pas avant l’automne prochain » et « on peut pas savoir » faut attendre le chiffre d’affaires en Power Point -R et la météo en 3D, et la dérive de l’anticyclone et le bilan semestriel et le mouvement de l’anticyclone, le retour sur investissement et le coup de sang des Açores / c’est vrai qu’on l’attend vachement la langue pendue le camembert sur la diapo peau vert-point avec plein de couleurs et de tranches et la grosse part bleue des bénefs qui brille on coupera pas la pointe c’est mauvais pour la conservation ça perd du goût et « on s’en fout c’est toujours les mêmes qui s’en mettent plein les poches » ça c’est bon pour la conversation et « y a une poche d’air qui pourrait compliquer l’affaire et baisser les bénefs » ça c’est pour la consumation jusqu’ici tout va bien la bourle est belle et boule de plus en plus boule de plus en plus belle avec ses hanches arrondies bonnes pour la consommation elle donne envie de foncer bille en tête frapper fort en plein dans le mille avec plein de zéro bingo banco qui font « splasch » et « krach » voici le moment de planquer plein de zéros à la fois/ voici le temps idéal pour faire ses conserves pour l’hiver et acheter des chewing-gums pour l’été
UNE FOIS tu comprends pas ça pète la nuit / j’ai rien vu je dormais je rêvais d’échanger quatre billes de verre contre un paquet de chewing-gum fraise pamplemousse mais l’autre copain avait qu’un calot plus très rond un jour donc la bourle sort de la bande même plus dans la marge elle a foutu le camp dehors elle a pris le maquis la lande obscure sans trace sur les pistes les zéros sont partis en file indienne à la queue leu-leu chez les abonnés des bourles décidées à bulletin secret i reste plus que des épaves par terre les bandes ont tout pris les zéros par boulettes de douze i reste que des débris je vous dis
en me promenant derrière le camping j’ai trouvé un zéro sur la plage tout rouillé et tout fêlé un morceau de zéro avec des coquillages incrustés je l’ai mis dans ma poche puis j’ai fait quelques pas sur les galets je l’ai jeté tu t’en fous je préfère continuer à bourler jusqu’ici tout va bien on pense encore à la bourle sans penser qu’elle est bourrelée on réfléchit trop tard aux pansements quand les gaz ont fait déserter la rue et que tous ont foutu le camp c’est fou quand on y songe ce qu’on peut bourler sans s’en rendre compte.
Il y aurait beaucoup à écrire sur ce texte, notamment sur le mélange entre l’esprit d’ordre et une certaine désinvolture qui se mêlent dans l’esprit du personnage. Entre nettoyer des prises de courant au coton tige, voire au cure-dent, l’obsession de straces sur le mur, et un certain délabrement du corps.
La lecture hier, presque intégrale, était très habitée.
Novarina, La quatrième personne du singulier (éditions POL)
Ce qui se poursuit : le travail sur l’inventaire des noms, « la langue à un », une langue propre à chacun, dans son vocabulaire, sa syntaxe, son rythme, sa respiration
ce qui change : la lettre au E muet, à Tibor Mészáros (l’opérette imaginaire, 2009)
Des formules définitives ?
Le langage travaille à l’impératif
Travaille tout dans l’envers retourné
le théâtre : désadhérer, lieu de la défaite humaine, ouverture à la quatrième personne du singulier : personne
le réel comme brûlement spirituel de la chose
Le langage s’est retiré de la page.
De cette dernière phrase il y a beaucoup à faire…
Performance impressionnante hier à Mona lisait
Julien Blaine en homme machine et brosse de fer raclée sur table en bois.
Un texte sur la machine et le sexe – nous sommes dans la machine.
Julien Blaine, Edith Azam,, Bernard Noël, d’autres articles intéressants sur la Grèce
Un rapport frontal, mégalomaniaque à l’Histoire, avec règlements de compte et réengagements, beauté de la mauvaise foi, jeu sur les balancements voici/ voilà, IL NE S4AGIT NULLEMENT / BIEN AU CONTRAIRE
la poésie sait, et sait bien, marcher et ne dort plus sur un papier
Il y aura toujours quelqu’un pour sortir un billet
remplir un chèque
faire péter la carte
il y aura toujours quelqu’un pour laisser un pourboire
pour payer un coup
s’acquitter d’une facture
il y aura toujours quelqu’un pour ça
parce que payer, il se dit
parce que l’argent quand même
parce que manque l’argent
et qu’il allait falloir continuer
DEUX MAINS OREILLES OUVERTES
d’un trait sans foi ni loi après les courses
avec puissance obsession et idiotie carrées
les forcer les ceinturer à un quart d’heure à la ronde
les pousser à l’éructation
d’abord les faire ramper
un par un
avec la force de la tétanie
d’une puissance ténue
qui fait glisser
lustrer le sol en lino
décoration parquet chêne brun poncé ciré laqué
travailler les mots
les pincer d’abord
par l’oreille ou le menton
crochet gauche à décocher
ou alors aussi cracher pour hypnotiser
un crachat nauséabond d’après la nuit
quand tout e corps a failli
goûter les voyelles
évider les mots de leurs vocales
même si on sait
qu’elles se taisant
les ordures voies
pas de de cesse
pas de retours
des tours de passe passe sans cessez le feu
incendies durables
coups de couteaux récurrents
en faire du rugueux
de la pâte râpeuse
boule en gorge
bille en foie
de l’exquis qui rejoint
de l’enduis de rebouchage
à mélanger
déranger
la langue profite à la langue
toujours plus forte par temps calme ou agité
là j’ai tenu
désossé
et encore raté
un grand ratage aux ¾
qu’est-ce qui s’est passé ?
C’était coincé des prépositions
prépositionnées dans la bouche derrière les dents
devant la ligne
du front même
avant même
l’arrivée
des minuscules mots
désossés ou pas
passeront entre les mailles par échos
souvenirs anticipations flexions
réflexions : tu les fléchis
ils te réfléchissent
refaire une stratégie
défense bambou
tactique du baiser de l’ours
prendre trois ongles à la hussarde
juste viser
se limer les ongles
deux mains
oreilles ouvertes
lectures / performances de Charles Pennequin (pas de tombeau pour Mesrine), Edith Azam, Stéphane Nowak Papantoniou (tubercule) et Stéphane Chalumeau (motif_R)
des versions sonores