Colloque« Le Manifeste s’éclate. Révolutions contemporaines du manifeste artistique et littéraire, entre théorie et pratique » Colloque

Colloque organisé par Camille Bloomfield, Jean-Marc Baud, Viviana Birolli, Mette Ruiz, Audrey Ziane.

Programme

Jeudi 24 novembre 2022

9h00 : Ouverture du colloque (Camille Bloomfield, Université Paris-Cité, CERILAC / PLEIADE et & Mette Ruiz (Université de
Dalécarlie, Suède) : Présentation du colloque & du projet Manart

Panel : « Nouvelles tendances, nouvelles formes : mises au point théoriques et réflexives »

9h30 : Viviana Birolli (Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne, HiCSA), « Manifeste, manifestes : reculons pour sauter plus loin »

10h : Arsène Caens (EHESS, Lier-Fyt), « Ethnographier le manifeste : polyphonie et assertivité »

10h30 : Discussion suivie d’une pause café

11h : Jean-Marc Baud (Université Sorbonne Paris Nord, PLEIADE), « Zanzibar, Perpendiculaire, Hétérotrophes, Inculte… : stratégies manifestaires chez quelques collectifs littéraires contemporains »

11h30 : Laude Ngadi Maissa (Université de Lausanne) : « Formes et genres du manifeste littéraire et artistique d’Afrique subsaharienne
francophone »

12h : Stéphane Nowak Papantoniou (poète). « Manifeste erroriste : présentation & action »

12h30 : Déjeuner

Panel : « Anthologies & manifestes de commande »

14h : Entretien avec Jessica Lack (critique d’art, Cambridge) autour de l’anthologie « Why Are We Artists? 100 World Art Manifestos » (2021)
Animé par Viviana Birolli (Université Paris I, HICSA)

14h30 : Table ronde sur les anthologies de manifeste, en présence de :
– Isabelle Pluta (Université de Lausanne, Centre d’études théâtrale et Groupe de recherche Nucleus), à propos du projet d’anthologie Scènes numériques. Digital Stages (PUR, 2022)
– Laurent Cauwet (éditeur d’Al Dante/Presses du réel), à propos de son anthologie Manifesten, un roman des avant-gardes (à paraître)
– Pierre Vinclair (poète & éditeur) : à propos du dossier « L’agencement des mobiles (manifestes) », dans le n°179-180 de la revue Po&sie

16h00 : Pause-café

16h15 : Entretien avec Julien d’Abrigeon & Gilles Cabut (Boxon) – animé par Jean-Marc Baud et Camille Bloomfield

17h00  Clôture de la journée

17h30-19h00 Soirée de performances au Centre d’art et de recherche « Bétonsalon » :

  • Mélanie Leblanc, lecture chorale du Manifeste du Nous (Les Venterniers, mars 2022)
  • Cabaret Courant faible (Isabelle Vicherat, Elise Vandewalle, Nicolas Guillemin) : Anti-CV ; proposition pour un manifeste (performance)
  • Julien d’Abrigeon / Gilles Cabut : lecture-performance

Vendredi 25 novembre 2022

9 h : Ouverture de la journée Par Audrey Ziane
Panel : Réalismes d’aujourd’hui : réception et extension d’un mouvement

9 h 15 : Bernard Müller (Ecole supérieure d’Art, Avignon) , « Le déjeuner sous l’herbe (Spoerri, 23.04.1983) ou l’enterrement du Nouveau Réalisme »

9 h 45 : Conversation entre Antje Kramer-Mallordy (Université Rennes 2 / Archives de la critique d’art) et Bernard Müller (Ecole supérieure d’Art, Avignon), « Entre les lignes du Nouveau Réalisme » 

10 h 15 : Discussion et petite pause-café

Panel : Le manifeste à travers les arts

10 h 45 : Anna Krykun (Université de Tours, EA Interactions culturelles et discursives), « Le manifeste littéraire au xxie siècle : un genre en quête d’auteurs »

11 h 15 : Elena Cervellati  Alma Mater StudiorumUniversité de Bologne), « Le manifeste en danse en France et en Italie : entre corps et parole »

11 h 45 : Léonore Conte (Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, AIAC), « Éducation ou dogme ? Le manifeste en design graphique à l’épreuve de l’école »

12 h 30 : Pause déjeuner

14 h : Clara Bouveresse Université d’Evry/Paris Saclay, SLAM), « Magnum/Antoine d’Agata Manifeste : débat par catalogues interposés »

14 h 30 : Amanda Robles (réalisatrice, associée à l’Université Toulouse Jean Jaurès – LARA-SEPPIA), « Le cinéma corporel de Maria Klonaris et Katerina Thomadaki »

 15 h : Pause-café

Panel : Du manifeste à l’œuvre : paroles d’artistes

15 h 15 : Discussion avec Audrey Ziane sur le manifeste « social », « Cabaret courant faible et la proposition d’anti-CV »

15 h 45 : Performance du poème dramatique La Mante, œuvre-manifeste du Théâtre des Grands Bois, puis discussion Chloé Kaïmakian et Jonathan Rousseau (Compagnie des Grands Bois)

16 h 45 : discussion finale, conclusion des travaux

Informations pratiques
Salle 064E, Halle aux Farines

Esplanade Vidal-Naquet, Paris 13ème

Journée d’étude Tarkos

Tarkos: poète: réunion de chantier

 Le petit bidon : lignes de tension
Entre « lire » et « dire », le texte et l’improvisation : écriture, performance, recherche et création.

Dans le but de présenter un état des lieux des réflexions et des recherches en cours sur l’œuvre de Tarkos, le Cipm organise au Frac une journée d’étude pour la clôture de l’exposition Tarkos poète.

La journée se découpera en quatre panels, deux le matin : généalogies Gabriel Proulx, LéoDekowski, Jonas Delaborde et formes David Christoffel, Thierry Weyd, Alexandre Mare. Les deux autres panels seront, l’après-midi : stratégies Nathan Lahire, Vianney Lacombe, Laurent Zimmermann et parole Anne-Christine Royère, Antoine Hummel, Stéphane Nowak Papantoniou.

Le matin

Muriel Enjalran, directrice du Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur et Michaël Batalla, directeur du Cipm
• Bienvenue

10h : GÉNÉALOGIES

Léo Dekowski, Normalien, agrégé de lettres modernes, et doctorant à CY Cergy-Paris Université
• Tarkos, poète français de la transition
J’essaierai de montrer comment la poétique de Tarkos se construit autour de la transition, la travaille et la réfléchit, à la fois dans une dynamique de démultiplication et par des tentatives d’invisibilisation.

Gabriel Proulx, Candidat au doctorat & chargé de cours, Département d’études littéraires, Université du Québec à Montréal
• Stein – Beckett – Tarkos
La critique a observé à plusieurs reprises les affinités qui existent entre le travail de Tarkos et celui de Gertrude Stein ou de Samuel Beckett, même si le poète français ne se réclame pas directement de ces deux monstres modernistes. Nous verrons comment se manifeste cette influence indirecte dans l’écriture tarkossienne, mais aussi dans quelle mesure la généalogie trouée que se crée Tarkos permet de repenser la notion d’héritage hors des modèles arborescents et linéaires.

Jonas Delaborde, Artiste plasticien, doctorant en Histoire de l’art au laboratoire HAR, unité de recherche de l’Université Paris Nanterre.
• Pascal Doury, Christophe Tarkos, braconnages croisés.
Pascal Doury et Christophe Tarkos ont collaboré entre 1997 et 1999 sur trois ouvrages (L’hypnotiseur soigne, Je m’agite et Le Bâton), une revue (poézi prolétèr, avec Kati Molnár, deux numéros parus), un projet d’exposition et de nombreux numéros de l’Encyclopédie des Images, une série de fascicules publiés par Doury. Quelles ont été leurs modalités de travail ? S’agit-il à chaque fois du même registre de collaboration ? Comment ces objets dialoguent avec le reste de leurs œuvres respectives ?

11h30 : FORMES

David Christoffel, Poète, compositeur et créateur radiophonique. Docteur en musicologie de l’EHESS, il est l’un des deux commissaires de l’exposition « Tarkos poète ».
• « L’englobement résiste, va »
Poèmes ronds, histoires de boules, effets de boucles, pensées sphériques, raisonnements circulaires, remises à zéro, jeux autoréférentiels… Tarkos arrondissait tout. Mais à force de tourner, ses poèmes creusent et remontent. Proposition de relecture écologique d’une œuvre à taille humaine.

Thierry Weyd, Enseignant à l’ésam Caen/Cherbourg – artiste dilettante – éditeur en chambre – amateur de curiosités – curator et à travers – diplomate utopiste
• (Peut-être…) = Oui, revu et corrigé par Karine Defrance. Expressif, le petit bidon (Improvisations et lectures, tome 1), par les éditions cactus.
En 1999, Christophe Tarkos est invité dans le cadre de l’Atelier de Recherche et de Création « Au pied de la lettre », organisé en Option Design Graphique par l’école des Beaux-Arts de Caen. Ces deux jours d’atelier ont été à l’origine d’un travail de recherche graphique et typographique mené par Karine Defrance, alors étudiante, en compagnie de Christophe Tarkos, à partir du livre Oui (Al dante/Niok, 1996), dans la perspective de son diplôme de fin de cursus ; du projet d’une collection de CD audio des enregistrements de Christophe Tarkos, produite par les éditions cactus ; de l’ouvrage inachevé Calligrammes de Caen, auquel devait être associé Pascal Doury, et, par conséquent, jamais édité par l’école des Beaux-Arts de Caen.

Alexandre Mare, Directeur de la Galerie Duchamp, centre d’art contemporain d’intêret national situé à Yvetot, il est l’un des deux commissaires de l’exposition « Tarkos poète ».
• Les poèmes sont des dessins
Si Tarkos aimait à publier parfois des dessins, les recherches en marges de l’exposition Tarkos poète permettent de mettre à jour un véritable corpus. Il s’agira dès lors de proposer une première lecture de cette oeuvre et comment celle ci semble endogène à l’oeuvre écrite.

L’après-midi

14h : STRATÉGIES

Nathan Lahire, Doctorant, UPHF
• Les Morceaux choisis de Christophe Tarkos : une « carte de visite » adressée au milieu de la poésie
Le critère de la radicalité constitue un principe fondamental de la pratique poétique et artistique de Christophe Tarkos. Celui-ci étudie méthodiquement la radicalité poétique telle qu’elle se présente à lui, en France, dans les années 1980 et 1990. Morceaux choisis (1995), l’un de ses tout premiers livres, en est le résultat. Faisant feu de tout bois, Tarkos s’y essaye à de nombreux « styles expérimentaux ». L’ouvrage fonctionne en fait comme une carte de visite adressée au milieu de la poésie : à travers elle, Tarkos s’y présente, aussi stratégiquement que spontanément, comme connaisseur et maître des grandes formes poétiques expérimentales de l’époque. Il s’y donne à voir comme un poète légitime.

Vianney Lacombe, Auteur, poète, critique, revuiste, il vit à Paris où il est né en 1946.
• Caisses, baton, bidon, farine : pour quoi faire ?
Dans Caisses (P.O.L, 1998), Christophe Tarkos parle du vent, des cailloux, du ciel. Pour quoi faire ? Pour qu’ils existent : il faut les sortir de la masse d’eux-mêmes, il faut montrer leurs détails, tout ce qui se cache sous la globalité de leur perception et pour cela, accepter de s’immiscer dans leur comportement, dans leur présence, dans leur réalité. C’est à l’opposé de l’action entreprise par Tarkos pour décrire Le bâton (Al dante, 1998), dont tous les avatars se déploient dans un espace absolu.

Laurent Zimmermann, Maître de Conférences, Université de Paris
• Se faire entendre
Sans doute la cellule poétique vivante à chaque texte chez Tarkos consiste-elle en cela : se faire entendre. Se faire entendre à soi quelque chose, le faire entendre aux autres. Toute la question est dès lors celle du comment, et donc des stratégies mises en œuvre pour y parvenir.

15h30 : PAROLE

Anne-Christine Royère, Université de Reims Champagne-Ardenne
• Tarkos : sonore ?
Le chantier que souhaite ouvrir cette communication est celui des relations que la poésie de Christophe Tarkos a pu entretenir, tout particulièrement au début des années 1990, avec la poésie sonore / action de Bernard Heidsieck et, plus largement, avec la musique. Il va s’agir d’examiner quelques pièces de ce corpus, d’en déterminer les spécificités et de réfléchir aux rôles qu’elles ont pu jouer dans le cheminement de Tarkos vers la lecture performée et l’improvisation.

Stéphane Nowak Papantoniou, Chercheur, docteur en littérature générale et comparée, spécialisé en poésie, performance, recherche-création.
• Le petit bidon : lignes de tension
Entre « lire » et « dire », le texte et l’improvisation : écriture, performance, recherche et création.

Antoine Hummel, Auteur d’une thèse de doctorat sur Christophe Tarkos, Nathalie Quintane et la « dé-spécialisation de la poésie » 
• « Une phrase je dis je me mets à aller penser quelque chose »
Dans nombre de ses semi-improvisations, Tarkos semble parler pour voir où ça le mène, phraser à partir d’un énoncé simplexe (« je ne fais rien », « je me peigne ») qui se complexifie en cherchant à gagner en clarté. On s’intéressera à ce mode oral — nécessairement tâtonnant, « épanorthotique » — et on le rapprochera de ce qu’un autre semi-improvisateur, David Antin, nomme « talk to discover »

https://www.frac-provence-alpes-cotedazur.org/Tarkos-poete-reunion-de-chantier

Parution: Julien Blaine Le grand dépotoir

En 2020, Julien Blaine, né en 1942, dresse l’inventaire (et fait don) de ce qui reste dans un atelier d’artiste à la fin d’une vie de création. Le grand dépotoirrassemble essais, lettres et réflexions sur sa vaste entreprise poétique depuis ses débuts, constituant une mise en perspective aussi bien qu’une introduction complète à sa démarche sacrilège.Le but est donc le suivant : 
Montrer tout ce qui me reste dans mes ateliers :
Absolument tout !
Les choses seront déposées dans les pièces et sur les cimaises de l’expo de ci de là à l’emporte-pièce (le mot composé est doublement juste).
L’exposition durera un mois, durant ce mois le public pourra venir choisir les œuvres qu’il désire emporter gratuitement et qu’il emmènera aussitôt après son choix.
Et à la fin, le mois étant écoulé, ce qui reste de l’expo composera un beau feu de joie à moins que tel musée le récupère dans ses réserves… !
Et je ne produirai plus que du texte dans des livres ou des revues.
Plus aucune toile, dessin, sculpture, installation, plus rien pour les collectionneurs, les galeries et les musées.
Et pas loin de passer au stade octogénaire, je cesserai aussi de me produire en chair et en os et en public.Dès le début des années 1960, Julien Blaine (né en 1942 à Rognac, vit et travaille à Marseille) propose une poésie sémiotique qui, au-delà du mot et de la lettre, se construit à partir de signes de toutes natures. Forcément multiple, il se situe à la fois dans une lignée post-concrète (par son travail de multiplication des champs sémantiques, en faisant se côtoyer dans un même espace des signes – textuels, visuels, objectals – d’horizons différents) et post-fluxus (dans cette attitude d’une poésie comportementale, où est expérimentée à chaque instant la poésie comme partie intégrante du vécu). Mais avant tout, la poésie s’expérimente physiquement : elle est, d’évidence, performative. Ses performances sont nombreuses, qui parfois le mettent physiquement en péril (Chute, en 1983, où il se jette du haut des escaliers de la gare Saint-Charles à Marseille : violence de cette dégringolade incontrôlable, et la réception, brutale, au sol, quelques centaines de marches plus bas… puis Julien Blaine met son doigt sur la bouche et, sous l’œil d’une caméra complice cachée parmi les badauds médusés, murmure : « chuuuuut ! »). Mise en danger du corps, et mise en danger du poète, qui toujours oscille entre grotesque et tragique, dans une posture des plus fragile, car « le poète aujourd’hui est ridicule ». Performances, livres, affiches, disques, tract, mail-art, objets, films, revues, journaux… sa production est multiple, mêlant éphémère et durable, friable et solide. Pas un outil, un médium qui ne lui échappe. Mais rien qui ne soit achevé, arrêté. Car pour Julien Blaine la poésie est élémentaire, tout ce qu’il produit est fragment, indice d’un travail toujours en cours, document d’un chantier poétique à chaque instant renouvelé. Tous ces « résidus » doivent être lus en soi et en regard de ce qui nous entoure.

https://www.lespressesdureel.com/ouvrage.php?id=7755&menu=0

Le grand dépotoir de Julien Blaine par François Huglo, les parutions, l’actualité poétique sur Sitaudis.fr

Pour une fois, définitive comme toute performance (à laquelle Julien Blaine avait dit « bye bye » entre 2004 et 2006, mais le pli est pris), « tout doit disparaître » n’est pas un argument de vente mais de gratuité, un comble de générosité. Tout : « ce qui reste dans un atelier d’artiste à la fin d’une vie de création » (toiles, dessins, sculptures). À emporter, et le reste au feu ! « Plus rien pour les collectionneurs, les galeries et les musées ». Le marché de l’art s’en remettra, mais la question de la valeur attachée aux œuvres d’art par le commerce et par la culture est posée par un acte exemplaire. Et au-delà, la question de leur production. Celle de la connexion entre travail et revenu. Celle d’un travail gratuit qui ne serait plus synonyme de plus-value mais de création. D’un travailleur libre qui ne serait plus prolétaire (contraint à vendre sa force de travail) mais artiste. C’était déjà le programme de « la vie-art », ou vrai art nouveau, de Jules Van alias ViArt alias Julien Blaine dans Libération en 1975 (grand millésime). Sur la portée de cet acte, sur sa maïeutique (oui, que faire de ce don ?), 28 amis s’interrogent, nous interrogent, parmi des photos de pages, des pages de photos.

« À l’une on vend ce qu’à l’autre on donne », dit le père Bonaventure dans un conte de La Fontaine, « Comment l’esprit vient aux filles », que réécrit Julien Blaine en ouverture sous le titre « Comment l’esprit vient au vieil artiste » : comment il se traduit par la création d’un lieu de dialogue conforme à sa vie, la Friche Belle de mai, lieu du « dépotoir » où il remet au pot cette œuvre-vie.

Le programme de « la vie-art » correspond à celui de Jean Dubuffet : « Ce qui manque à la culture est le goût de la germination anonyme, innombrable (…). Une production d’art qui ne met pas gravement la culture en procès, qui n’en suggère pas avec force l’inanité, l’insanité, ne nous est d’aucun secours ». La « valeur esthétique, valeur éthique, valeur civique », est intimement liée à la valeur
« pécuniaire », les marchands s’appliquant « à obtenir des prix élevés, lesquels sont ensuite générateurs de prestige ». On ne se libèrera donc « du poids pernicieux de la culture qu’en supprimant la notion de valeur des productions mentales ». Valeur marchande et valeur esthétique relèvent du même fétichisme. « C’est le produit dont toute la culture fait son aliment et non le
produire ». (Asphyxiante culture, couverture et extraits reproduits sur cinq pages, avec dans leur prolongement trois pages tirées de Processus de déculturation, un itinéraire, de Julien Blaine, les anartistes, 1972).

Faut-il parler, avec Jean-Charles Agboton-Jumeau, d’ « autodafé permanent » ? Évidemment pas au sens de Savonarole, des nazis, des franquistes, de Pinochet, des Talibans, de l’État islamique, ou de « ces prêtres catholiques de Koszalin », en Pologne, qui, rapportera Gilles Suzanne, ont brûlé en 2019 « quelques exemplaires de Harry Potter ». C’est un « feu de joie » que promet Julien Blaine avec le reste (s’il y a un reste) des restes (le résidu du résidu), pas un feu de haine et de ressentiment. Un feu de lumière, pas un feu d’éteignoir. Il s’agit bien de

« disperser, dissiper, gaspiller », de « soustraire à la convoitise d’éventuels gorets ».

Démosthène Agrafiotis rapproche le geste de Julien Blaine de l’ultime réalisation d’Hokusai, La vague masculine et la vague féminine, œuvre à la fois « signature » et « ouverture ». En dénonçant « la pseudo-universalité de la valeur d’échange »,

Le grand dépotoir de Julien Blaine par François Huglo, article sur sitaudis, https://www.sitaudis.fr/Parutions/le-grand-depotoir-de-julien-blaine-1589750658.php

Julien Blaine « propose un champ de signes afin que l’art refonde et refasse émerger l’existence humaine qui résiste à notre monde en proie à des mutations infernales ».

De même, pour Laurent Devèze, « cet arrêt est un appel à la relève (…) : à vous maintenant ! ». Blaine fait valoir son droit à la paresse : il renoue avec Lafargue, avec Duchamp : « j’aime mieux vivre que travailler », avec Filliou : « l’art c’est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art ». Bartolomé Ferrando insiste, dans le sillage de Pierre Restany, sur « la fonction déviante de la gratuité » et « son lien avec l’exercice de la liberté ». Giovanni Fontana parle d’une « performance absolue », orientée « vers la poésie totale » (Adriano Spatola, 1969), à travers une « allure », une « attitude créative », un « comportement perpétuellement

ludique », une « ironie ». Le feu « sera-t-il jamais allumé ? ». Il l’a été dès que Blaine « a commencé à être poète ».

Jacques Guigou se souvient de « cette expression argotique : « Dépoter le gluant » qui signifie accoucher ». De quoi ? Guigou voit dans le dépotoir « un conseil ouvrier contre les arts domestiqués ». Pour Patrick Javault, un art sorti du marché « va se risquer à une nouvelle vie à travers le don ». Gérard-Georges Lemaire traduit en fables, « coup de pied de l’âne » et mouche du coche, une « conception iconoclaste de l’art ». Barbara Meazzi voit et entend dans « bon débarras » le passé simple du verbe débarrer : Blaine « débarra », il ôta la barre, écarta les barreaux, fit gicler sur ceux des affiches qui marchandisent l’art le spermatoZoo

« libre de couler tant qu’il ne se dessèche ». Geste de dissémination, déjà.

Pour Stéphane Nowak-Papantoniou, qui cite l’Essai sur le don (1925) de Marcel Mauss, et Jacques Derrida, « le procédé de dissémination volontaire permet de biffer la logique verticale de l’héritage, la loi du sang et celle de l’aîné ». Ce geste est « fondateur, et non conclusif ». La « part maudite » selon Bataille devient ainsi « part magique », passage de l’économie restreinte à l’économie générale. Retour à l’archaïque via, écrivait Mauss, « la joie de donner en public ; le plaisir de la dépense artistique généreuse ; celui de l’hospitalité et de la fête privée et publique ».

Laurent Cauwet revient sur Fiumalbo en 1967, le Manifeste sous forme d’idéogrammes de 1968, La poésie hors du livre (1971), Géranonymo (1972), le Vrai Art Nouveau (1975) : appels, dans Libération « encore rebelle », au sabotage, au perruquage, au détournement, au vol, etc., « comme réponse créative à l’aliénation subie ». Continuer « ne peut se faire seul mais toujours en appelant à la responsabilité du lecteur comme continuateur ». Voilà qui répond à Nathalie Quintane s’interrogeant sur la « vraie question pour le public : récupérer = thésauriser = spéculer + ou – consciemment (= sait-on jamais) ». Défi, appel à responsabilité : maïeutique, décidément. « Tout Blaine à la décharge » ? Pour
« tout réinitialiser », en un « repas totémique », écrit Patrizio Peterlini. Où, ajoute Tanabé Shin, « chacun de nous doit trouver « poète » dans toute son existence, à sa propre façon ». Marianne Simon-Oikawa voit Julien Blaine en « lettré zen », son geste s’apparentant au danshari qui, à la fois, refuse, jette, et se détache. Remerciements de Jean-François Meyer pour les traces de rencontres en sa galerie, de Mata Rosenquist pour le legs marseillais : MAC, Musée d’Arts africains, CipM, la Friche… et de Christina de Simone pour « toutes les voies ouvertes », de Liliane Giraudon, d’André Robèr, de Jean-Hubert Martin, de Jean-Claude Monod, de Peter Read, de Nicolas Roméas, d’Oliva Penot-Lacassagne pour l’ « impérieux travail de refondation de l’action et de la pensée ».

La règle du jeu selon Gilles Suzanne : « faute de fuir, tu fais que ça fuie ». Car le capitalisme capte et neutralise tout ce qui lutte « contre l’hégémonie culturelle des classes dirigeantes et bien pensantes ». Le marché fonctionne « comme un grand collecteur ». Pour Blaine, cet « hérétique », ce qui importe « n’est pas le fétiche, c’est-à-dire le produit. C’est l’effet : le fait que ce produit produise ». La Friche Belle de mai comme « utopie concrète ». La poésie comme « mode de fonctionnement alternatif de la langue, du livre, de l’écriture, de la lecture, mais aussi de soi et du monde… peut-être même du marché et de l’État ». Anysia Troin- Guis cite « la devise proclamée par la performance Breuvage épandu (1968) : l’écriture n’est « pas le résultat mais les gestes qui l’ont précédé et suivi ». En une « pratique existentielle, sociale et démocratisée », l’exposition devient « partage du commun » par un homme qui « semble être seul », ce qui « fait peur » à sa compagne Catherine qui ajoute : « et surtout Jules a l’air vraiment content ! ». Libre comme une ihali (installation humaine anonyme laissée là par inadvertance) : ihalibre, y’a libre ! Free (libre, gratuit), like a rolling stone.

colloque « Contre la poésie, la poésie »

Colloque international, “Contre la poésie, la poésie”, 

17, 18 et 19 juin 2021

Université de Liège et Université Paris 8

en distanciel :

Lien public pour suivre le colloque : https://stream.lifesizecloud.com/extension/9455991/010dd996-3a84-4c44-ac8a-8b66554bddaf

Soirée de lectures et performances à la Maison de la poésie de Paris, le 17 juin à 20h

Avec Michèle MétailJacques DemarcqLaure GauthierPierre Vinclair et Lisette Lombé.

Soirée en présentiel et retransmission en direct sur la chaîne Youtube de la Maison de la Poésie (lien : https://www.maisondelapoesieparis.com/events/contre-la-poesie-la-poesie/)

Haine de la poésie : tel est le titre emprunté à Bataille et donné par des poètes à un volume d’essais poétiques paru en 1978 chez Christian Bourgois. Ce titre, volontairement polémique, pour un ouvrage qui réunit des écrits de poètes, invite à poser la question des critiques de la poésie. Contrairement aux travaux effectués dans le champ des études théâtrales sur la « haine du théâtre » (François Lecercle), il n’est pas question ici d’interroger les condamnations extérieures au champ poétique, mais bien les controverses internes : non pas les contempteurs de la poésie, mais les animosités de poètes envers la poésie elle-même, ou ses avatars.

Les contributions de Mathieu Bénézet, Franck Venaille et Bernard Noël à l’ouvrage Haine de la poésie proposent une première interprétation de cette expression : la poésie y est associée à un mensonge fait à soi-même, une sorte de mirage vain auquel le poète (dont l’identité est par là-même remise en cause) s’efforcerait de croire, au même titre que la religion, par exemple. On interrogera, dans cette perspective, le rapport du poète à son oeuvre : quelle posture adoptent les poètes vis-à-vis de leur entreprise poétique ?

Contre la poésie : adversative, la préposition contre exprime aussi la proximité, voire l’intimité. Qu’est-ce qui a pu amener la poésie à se positionner contre la poésie – tout contre elle ? Que se cache-t-il derrière le mot poésie quand on s’oppose à elle ? Ne s’oppose-t-on pas davantage à des types de poésie, à des personnes, à des définitions, plutôt qu’à la poésie elle-même ?

Les avant-gardes poétiques du XXe et XXIe se sont construites dans une opposition à la poésie (pré-)existante. En 1918, Tristan Tzara proclamait dans le deuxième manifeste Dada : « Que chaque homme crie : il y a un grand travail destructif, négatif à accomplir ». La virulence du propos – et de l’entreprise dadaïste en général- devait placer les avant-gardes de ce début de siècle sous le signe de la révolte et du dégoût – même si l’émergence du surréalisme témoigne d’une poésie qui concilie esprit de révolution et élaboration d’un système de pensée, capable de féconder des formes poétiques nouvelles.

Sur le plan formel, la révolution poétique opérée par le « Coup de dés » mallarméen, a ouvert la voie à des explorations typographiques et visuelles qui marquent profondément l’histoire de la modernité poétique, et font exploser les unités traditionnellement constitutives du poème que sont la ponctuation, la strophe et le vers. Les calligrammes d’Apollinaire font fi de la linéarité, les livres de poésie d’Orange Export Ltd. accordent une place considérable à l’espace blanc, la concrete poetry élabore des poèmes visuels qui s’offrent à l’oeil comme des oeuvres plastiques, Michèle Métail trace des poèmes topographiques, qui se lisent comme des cartes, Suzanne Doppelt accompagne ses textes de créations visuelles qui viennent interrompre le fil de la lecture poétique.

Le désir de rupture a également mené à une exploration de différents medium poétiques, posés comme des réponses —ou réactions— à l’hégémonie de la poésie livresque. Contre l’espace du livre, se développent les expérimentations de la poésie sonore (Bernard Heidsieck, Christophe Tarkos), les lectures de poètes (Gwenaëlle Stubbe), les performances poétiques (Julien Blaine, Caroline Bergvall), ou encore les expérimentations poético-musicales menées à l’IRCAM par Laure Gauthier.

Le lyrisme est, lui-aussi, la cible d’attaques répétées. La poésie objectiviste américaine, dans son effort tendu vers une objectification du poème, ouvre la voie, en France, à une poésie sans accent poétique (Hocquard). Le concept de modernité négative forgé par Emmanuel Hocquard dans la Bibliothèque de Trieste synthétise les refus qui caractérisent une partie de la poésie française à partir années 1970. Contre un certain lyrisme basé sur la métaphore et l’image s’impose une poésie littérale. Cette modernité apophatique, contemporaine des Language poets aux Etats-Unis, développe une poésie grammaticale, qui cherche à s’affranchir des normes langagières, jugées normatives et apoétiques. Ces poétiques, qui se définissent par un écrire contre (Gleize), rassemblent poètes et antipoètes d’horizons divers, et donnent naissance à des oeuvres qui se lisent comme autant d’entreprises de transgression : Le Renversement de Claude Royet-Journoud, Césured’Anne-Marie Albiach, Le mécrit de Denis Roche (précédé de Lutte et rature), les Povrésies de Jude Stéfan (témoignage de sa « Poésie-pire », qu’il qualifie aussi de « poésie-contre »), etc.

Autant de poétiques de rupture (Laurent Jenny), de reconfigurations des écosystèmes poétiques, de questions posées à la poésie sur sa propre nature, de remise en cause de l’existence d’une « essence » poétique, de casse-têtes définitionnels…
Si la formule de Bataille, reprise par des poètes, a donné naissance à cette réflexion, il ne s’agira pas de s’interroger sur l’oeuvre de Bataille ou le contexte théorique de celle-ci, mais plutôt d’élargir la question du rapport conflictuel de la poésie à elle-même à un contexte qui dépasse celui de la poésie française de la seconde moitié du XXe s, et ne se limite pas à un groupe de poètes. Reposer la question de la nature du poétique, par le biais de ce qui s’est opposé à elle, au sein même d’un champ que l’on voulait, nommait poétique. On le comprend, ce colloque ne pourra pas faire l’économie d’une réflexion sur la nature du fait poétique – et à cet égard, les travaux de Jean-Marie Gleize sur la sortie de la poésie et la postpoésie restent décisifs.

PROGRAMME : 

Jeudi 17 juin 2021

13h  Ouverture du colloque : Martine Créac’h (Université Paris 8), Gérald Purnelle (Université de Liège)

13h30- 15h   Haines de la poésie (modération : Martine Créac’h)

  • Stéphane Cunescu (Université de Liège – Paris 8) : « Parricides pour d’autres formes. Franck Venaille écrit contre les pères. »
  • Nicolas Servissole (Université Paris 8) : « Jude Stéfan tragique mais. Poésie contre : poésie malgré. »
  • Michel Aulas (Université Paris 8) : « Aux origines de la haine de la poésie (Georges Bataille). »

15h30- 16h30  Au cœur de la poésie : la contradiction ? (Modération : Gérald Purnelle)

  • Pamela Krause (Sorbonne Université – Université catholique de Louvain) : « Éloges de la haine : le cancer ‘romantico-lyrique’ de Francis Ponge. »
  • Alexandre Battaglia (Université Paris 8) : « Patrick Wateau : un penseur privé de la poésie. »

20h      Soirée de lectures et performances à la Maison de la poésie de Paris

Avec Michèle MétailJacques DemarcqLaure GauthierPierre Vinclair et Lisette Lombé.

Soirée en présentiel et retransmission en direct sur la chaîne Youtube de la Maison de la Poésie (lien : https://www.maisondelapoesieparis.com/events/contre-la-poesie-la-poesie/)

Vendredi 18 juin 2021

10h – 11h « Stratégies de distanciation » (Modération : Stéphane Baquey)

  • Lénaïg Cariou (Université Paris 8) : « Théâtraliser le poème ? Orange Export Ltd.et la démarche hocquardienne. »
  • Nassif Farhat : « Renoncer le poème. Trois mots sur Phrase de Philippe Lacoue-Labarthe. »

11h30 – 12h30  L’obstacle au poème   (Modération : Stéphane Cunescu)

  • Philip Mills (Université de Lausanne) : « Franchir la résistance — ou plutôt la non-résistance, d’abord, ‘du langage poétique’. »
  • Adel Habbassi (Université de Tunis El Manar) : « La parole poétique de Mohammed Khaïr-Eddine, ‘un acte qui n’a ni nom ni qualificatif’. »

14h30 -16h Critiques politiques du fait poétique (Modération : Michel Delville )

  • Solène Méhat (Université Paris 8) : « Nécessité et impossibilité de la poésie chez les poètes autochtones écrivant aux Etats-Unis et au Chili. »
  • Stéphane Nowak  : « Sylvain Courtoux et les éditions Al Dante : postures, positions, affrontements. L’art de désigner l’ennemi. »
  • Milena Arsich (Université de Strasbourg) : « Contre la poésie institutionnalisée :  la démarche désacralisante de Dmitri Prigov. »

16h30 – 17h30 “Contre la poésie, les poètes ?” Table-ronde avec Laure Gauthier, Jacques Demarcq, Lisette Lombé et Pierre Vinclair (Modération : Stéphane Cunescu et Lénaïg Cariou)

Samedi 19 juin 2021 

10h – 11h30 Post-poésie : contre-poésie ? (Modération : Abigail Lang)

  • Jeff Barda (Université de Manchester) : « Est-ce de la poésie ou autre chose ? »
  • Antoine Hummel (Université Polytechnique des Hauts de France) : « La question-de-la-poésie, site épistémique de la modernité poétique. »

13h30 – 14h30 Contre le texte poétique, la poésie multimédiale (Modération : Lénaïg Cariou)

  • Coral Nieto Garcia (CRAL- EHESS) : « La poésie de Laure Gauthier comme un film du hors-chant entre les mots. »
  • Michel Delville et Livio Belloï (Université de Liège/ FNRS/UR Traverses/CIPA) : « Tom Philips : la poésie contre le roman contre la poésie. »

15h Fin du colloque

Universités organisatrices : Université Paris 8 et Université de Liège. En partenariat avec la Maison de la poésie (Paris).

Comité d’organisation : Martine Créac’h (Université Paris 8), Lénaïg Cariou (Université Paris 8), Gérald Purnelle (Université de Liège), Stéphane Cunescu (aspirant FNRS -Université de Liège).

Comité scientifique : Martine Créac’h (Université Paris 8), Gérald Purnelle (Université de Liège), Anne Gourio (Université de Caen), Abigail Lang (Université Paris 7), Vincent Broqua (Université Paris 8), Jean-François Puff (Université de Cergy), Stéphane Baquey (Université Aix-Marseille), Anne-Christine Royère (Université de Reims), Michel Delville (Université de Liège).

Poètes présent·es : Michèle Métail, Laure Gauthier, Lisette Lombé, Pierre Vinclair, Jacques Demarcq.

Intervenant·es universitaires : Nicolas Servissole, Stéphane Cunescu, Michel Aulas, Pamela Krause, Alexandre Battaglia, Lénaïg Cariou, Nassif Farhat, Philip Mills, Adel Habbassi, Solène Méhat, Stéphane Nowak, Milena Arsich, Jeff Barda, Antoine Hummel, Coral Nieto Garcia, Michel Delville et Livio Belloï.

Lien public pour suivre le colloque : https://stream.lifesizecloud.com/extension/9455991/010dd996-3a84-4c44-ac8a-8b66554bddaf

Contact : colloquecontrelapoesielapoesie@gmail.com

Colloque | Charles Pennequin : poésie tapage

Du 3 au 4 juin 2021

Programme

En ligne:

https://marge.univ-lyon3.fr/colloque-charles-pennequin-poesie-tapage-2

Charles Pennequin : poésie tapage

Photographie avec mégaphone et papiers © Gaël Dadies

Le colloque « Charles Pennequin : poésie tapage » s’est tenu en juin 2021 sous une forme particulière, conséquence des contraintes et incertitudes sanitaires. Un blog a été créé pour recevoir en amont les communications, dans des formats divers, laissés libres, ainsi que des documents qui devaient servir de point d’appui aux échanges. Les sessions en direct ont ainsi pu être entièrement consacrées aux discussions autour des communications. Par ce choix de format, nous avons tenu à préserver, malgré la distance, ce pour quoi on tient un colloque, en laissant une place privilégiée aux échanges. Cette manière funambule, qui laissait place à l’improvisation et au risque, devait aussi coller à l’« objet Pennequin », d’autant que le poète, présent durant toute la durée du colloque, pouvait réagir, commenter, dialoguer avec les intervenants.

C’est une partie de ce format vivant que nous avons voulu conserver dans la présente publication en ligne des actes, en actualisant le blog pour y faire figurer ce que le présent site ne peut accueillir : l’enregistrement vidéo de la table ronde « Armée noire », l’entretien avec le chorégraphe Dominique Jégou, ainsi qu’un ensemble documentaire ayant servi de point d’appui aux discussions. Certains articles y trouvent également des enrichissements documentaires (diaporama, vidéos, photographies).

Accéder au blog…

Accéder aux actes vidéo du colloque sur la Web TV de l’Université Lyon 3…

Textes réunis par Anne-Christine Royère et Gaëlle Théval.

Mis en ligne avec le soutien de l’Université de Lausanne.

https://www.fabula.org/colloques/sommaire7643.php

Communications 2018-2019

  • Poésie et politique. Métapolitique et écopoétique contemporaines, 8e Congrès de la Société européenne de Littérature comparée (Lille), 28 au 31 août 2019.

La poésie documentaire ou documentale vise bien souvent à questionner l’esthétique poétique et la politique des discours dans la mesure où il s’agit de rendre visible des invisibilités, de rendre audibles des paroles non légitimées, en travaillant sur le dispositif textuel et sa contextualisation. Nous tenterons de théoriser certaines articulations poésie/politique, ainsi que le rapport à l’environnement, notamment à partir de textes de Manuel Joseph, J.M. Gleize, Nathalie Quintane, J.H. Michot.

  • « Retirer de la matière. Surface et profondeur. L’Essai sur la sculpturale de Julien Blaine (1967) », Colloque « L’Écrit et le Sculptural », Université Toulouse – Jean Jaurès/Laboratoire LLA-CREATIS, 12-13 juin 2019, Maison de la Recherche.

L’intervention traitera de L’Essai sur la sculpturale[1] de Julien Blaine (1967). Ce livre paradoxal développe les recherches sur le livre et ses possibilités comme objet : sa mobilité, sa présence, sa matérialité. À chaque fois, il s’agit de critiquer le livre comme « support » : « le livre était sous-utilisé, il restait un objet mort et, selon la tradition, indépendant de l’auteur ». Autrement dit, le livre n’avait pas été pensé comme medium ; le strict utilitarisme de l’objet technique oblitérant les potentialités médiopoétiques qu’il recèle. L’Essai sur la sculpturale (ou à la recherche de l’intégralité du O est un livre radical marqué par la perforation et ses légendes :

  • « à la première perforation = la pénétration »
  • « aux suivantes perforations = la progression -> création (répété) »
  • « à la dernière perforation : la fuite inversée. Et définitive pénétration -> destruction »

Ces gestes peuvent être réfléchis comme communs à l’écriture et à la sculpture. À la manière des livres d’enfants d’aujourd’hui, une illusion est suggérée par la perforation comme si l’on pouvait regarder à travers le trou d’une serrure. Du coup, la page n’est plus une porte qui fait obstacle, mais un support qui crée un effet de relief. Derrière, il y a en dessin toute la thématique que Blaine va explorer pendant plus de quarante ans : les orifices, les organes sensoriels, la vulve, la ligne. Isabelle Maunet l’interprète comme une « sortie non pas hors du livre, mais hors de ‘’l’objet-livre ou du livre-objet’’[2] ». Il s’agit de sortir d’un certain état du livre que Blaine considère comme « inerte » et « mortifère[3] ». La sculpture peut ici s’entendre comme un procédé de création visant à « enlever de la matière ». L’acte d’écriture serait indissociable du geste de retirer, supprimer, enlever. L’accent est mis sur le processus et non le résultat. Car ce qui donne à penser c’est bien plus l’essai, l’action, le mouvement bien davantage que l’œuvre. Autrement dit, l’œuvre se donne comme œuvre à l’œuvre et non objet fini : œuvre désœuvrée. 

  • « Écritures du quotidien : pratiques de collage et de montage », Colloque — « Les écritures contemporaines du quotidien : une cartographie », Université de Strasbourg, 6-7 juin 2019.

La communication vise à montrer comment des récits contemporains du quotidien sont mélangés avec des pratiques d’avant-gardes et des pratiques issues des poètes objectivistes américains à travers trois exemples précis et expérimentaux de chroniques du quotidien : Manuel Joseph, La Sécurité des personnes et des biens, P.O.L., 2010 ; Jérôme Bertin, Bâtard du vide, Al Dante, 2011 ; Sylvain Courtoux, Still nox, Al Dante 2011.

Ces récits ont pour point commun de retracer le quotidien de l’auteur-narrateur en insérant un témoignage sur les structures sociales et politiques qui l’entourent : documents administratifs et publicitaires ; description de la violence sociale alentour ; restitution de scènes vues et de paroles entendues ; ouverture à la fiction par l’aventure du personnage. Cette hybridation entre quotidien et fiction fait émerger les traits saillants d’une certaine crise de la société et de la solidarité. Ces trois ouvrages ont pour point commun d’être écrit par des poètes vivant dans la précarité et dans une certaine marginalité, les trois auteurs touchent l’allocation adulte handicapé et en font état ; la thématique glisse bien souvent du personnel au politique. Ils ont aussi pour point commun de reprendre certaines pratiques des avant-gardes : opérations de collages et de montage ; insertion de photos et de documents ; et partageant certaines références communes : Dada, William Burroughs, Charles Bukowski. Nous verrons ainsi comment l’infra-ordinaire peut se charger de questions politiques.

  •  « Traduire la poésie à l’épreuve du plurilinguisme », 5th International Conference Traduttologia e Traduzioni, Translatology and Translations, Lodz, Pologne, 7-9 décembre 2018.
  • « La poésie contemporaine dans une perspective écopoétique : le cas des performances et des documents poétiques », Colloque international « Réinventer la nature : pour une approche écopoétique des littératures contemporaines de langue française », Université de Tunis, Tunisie, 9-11 novembre 2018.
  • « Chercher en adoptant un point de vue émique : traduire sa recherche par la mise en pratique », journée doctorale « à l’entour de la recherche », CND Lyon, 21 septembre 2018.

[1]   Julien Blaine, Essai sur la scripturale, Éd. Denise Davy, 1967.

[2]   Isabelle Maunet, « La poésie ‘en chair & en os, à cor et à cri’ de Julien Blaine », in La poésie à outrance. A propos de la poésie élémentaire de Julien Blaine, op.cit., p. 68.

[3]   Processus de déculturalisation, Paris, édition Tête de feuilles, 1972.

Publication des actes de la journée « Fabrique de thèse #3 – A l’entour de la recherche » du 21 septembre 2018

  • « À l’intérieur et à l’extérieur : quelle posture pour un poète
    et chercheur en littérature ? » Actes de la journée Fabrique de thèses # 3, CND, Lyon. Comment chercher, enseigner, animer des ateliers, créer sans mélanger les points de vue et/ou se tromper de posture ? L’article développe l’intérêt d’adopter un point de vue « émique » de l’intérieur tout en adoptant un point de vue critique décentré. Est aussi développée la notion de traduction de texte littéraire en proposition d’écriture. 

URL : https://f.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/4565/files/2019/10/atelier_2018_septembre.pdf

articles critiques

  • « Ou, i ou O, ui ? », revue Vakxicon.gr no 35, 2016. En ligne : www.vakxikon.gr/oui-ou-oui-του-stephane-nowak-papantoniou/
  • « Alfredo Costa Monteiro : Anima/Aspis », Cahiers critiques de poésie (Centre international de Poésie Marseille), 33-1, 2016.
  • « Jean-François Bory : Un hiver près des ptyx », Cahiers critiques de poésie (Centre international de Poésie Marseille), 31-3, 2016.
  • « Laura Vazquez : Le système naturel et simplifié/Menace », Cahiers critiques de poésie (Centre international de Poésie Marseille), 31-3, 2016.
  • La poésie de Jean-Michel Espitallier, livret pédagogique à destination des enseignants, Livres at auteurs d’aujourd’hui, Ciclic, avec le soutien du Conseil régional et de la DRAC Centre Val-de-Loire et en partenariat avec le Rectorat de l’académie Orléans-Tours, la DRAAF et le Centre national du livre. En ligne : http://www.ciclic.fr/sites/default/files/fichiers/livret_lalapdf2015.pdf
  • « Amandine André : Quelque chose », Cahiers critiques de poésie (Centre international de Poésie Marseille), 30-4, 2015.
  • « Jean-Michel Espitallier : Salle des machines », Cahiers critiques de poésie (Centre international de Poésie Marseille), 30-4, 2015. En ligne :http://cahiercritiquedepoesie.fr/chroniqueurs/stephane-nowak-2
  • Qu’est-ce que le commandement ?, revue Inferno n° 2, 2014.
  • Mécanique tapuscrite. Les tapuscrits de Bernard Heidsieck, revue Inferno n° 3, 2014. 

Communications

– « La poésie contemporaine dans une perspective écopoétique : le cas des performances et des documents poétiques », Colloque international « Réinventer la nature : pour une approche écopoétique des littératures contemporaines de langue française », Université de Tunis, Tunisie, 9-11 novembre 2018.

– « Chercher en adoptant un point de vue émique : traduire sa recherche par la

mise en pratique », journée doctorale « à l’entour de la recherche », CND Lyon, 21 septembre 2018.

– « Des performances aux écritures créatives », Congrès international 2017 de la Société d’Étude de la Littérature et de Langue Française du XXe et du XXIe siècles « Extension du domaine des lettres », Aix-Marseille Université, Aix-en-Provence, 14-16 septembre 2017.

– « Questions de distance critique avec les représentations des auteurs contemporains », journée d’étude « Chercher au présent », Université Lumière Lyon II, Lyon, 1er décembre 2016.

– « Lire et écrire avec nos contemporains », colloque international « À l’écoute du poème : enseigner des lectures créatives », Université Grenoble Alpes, Grenoble, 16-17 mars 2016.

– « Questions sur le post-générique », Atelier de recherche en création littéraire « fonder les bases, dégager des orientations, ouvrir d’autres perspectives disciplinaires », Aix-Marseille Université, Marseille, 5 et 6 février 2015.

– « Pratiques de la poésie-action », journée d’étude « Poésie & performance (II) : pratiques contemporaines », Université Paris 3 Sorbonne nouvelle, Paris, 17 octobre 2014.

– « L’atelier d’écriture et ses marges – écriture dédaliques en prison », forum « Former aux ateliers d’écriture à l’université, vingt ans après : métamorphoses, pratiques, perspectives », Aix-Marseille Université, Marseille, 4 et 5 avril 2013.